Épargner quand on est jeune : mission possible, même avec peu

L’épargne semble souvent réservée à celles et ceux qui ont déjà une vie bien installée. Pourtant, nous pouvons – et devrions – commencer dès nos premiers revenus. Même avec un budget serré, nous avons les moyens d’adopter de bons réflexes pour mieux gérer notre argent. L’objectif : construire, petit à petit, une sécurité pour l’avenir.

Épargner dès le début de notre vie active permet de poser les fondations d’un équilibre financier durable. Ce n’est pas le montant qui fait la différence, mais
l’habitude que nous développons. Commencer à mettre de côté tôt, même avec de petites sommes, c’est déjà bâtir quelque chose. « Même une petite épargne peut croître avec le temps et offrir un vrai sentiment de contrôle, particulièrement précieux en période d’incertitude », explique Sam Kurath, cofondateur et président de MoneyHaxx. Cette association, lancée en 2023 à Lucerne, veut booster l’éducation financière des ados et jeunes adultes en Suisse – en allemand, français et italien. Le projet a vu le jour face à une réalité préoccupante : très peu de formations scolaires nous préparent à gérer notre argent. Pendant ce temps, les paiements différés se multiplient, et 80% des personnes endettées en Suisse le sont avant 25 ans. Les incertitudes autour de la prévoyance vieillesse renforcent l’urgence de nous y préparer dès maintenant.

Des erreurs trop nombreuses, et une pression qui monte

Pour Sam Kurath, beaucoup de jeunes sous-estiment leurs dépenses réelles, attendent trop pour créer un fonds d’urgence, et tombent dans les pièges des crédits à la consommation ou des achats impulsifs. L’une des erreurs classiques : croire qu’on commencera à épargner « plus tard ». Sauf que ce « plus tard » tarde souvent. Et les chiffres le confirment : une étude récente du cabinet Deloitte révèle que près d’un jeune Suisse sur deux – parmi les moins de 40 ans – s’inquiète pour sa situation financière. Avec le coût de la vie qui grimpe, mettre de côté devient compliqué, et la retraite semble de plus en plus abstraite. « La génération Z suisse semble plus pessimiste sur son avenir financier que ses homologues dans d’autres pays », précise l’étude.

« Je mets de l’argent de côté dès que possible »

Lara Melo Wollinger, 22 ans, est vice présidente de la Junior Entreprise Genève, une association étudiante qui accompagne les jeunes dans leurs premiers pas professionnels. Pour elle, épargner est devenu essentiel : « Le futur est incertain. J’ai ouvert un compte épargne et j’apprends à faire des choix entre mes envies et mes priorités ». Zainab Bahri, 21 ans, coprésidente de la même structure, partage cette approche : « Je mets de l’argent de côté dès que possible. L’épargne est devenue un réflexe nécessaire, même modeste ». Toutes deux rappellent que la pression financière est bien réelle. Il arrive de devoir dire non à certains événements étudiants ou opportunités professionnelles, juste pour des raisons de budget.

Toutefois, la Junior Entreprise Genève est aussi un vrai terrain d’apprentissage. Grâce aux missions réalisées pour des entreprises, les étudiantes et les étudiants développent des compétences clés qui aident à mieux gérer son argent : sens des priorités, rigueur, conscience budgétaire, projection vers l’avenir, anticipation de ses besoins. Bref, des bases concrètes pour apprendre à épargner, même sans gros moyens.

Des gestes simples, et des outils qui aident

Si on veut s’y mettre et que l’on ne sait pas par où commencer, Lara et Zainab conseillent de répartir son budget par postes – logement, alimentation, sorties, etc. –et de dresser une liste mensuelle de dépenses. « Cela permet d’anticiper les imprévus et de fixer des priorités. » Un avis partagé par Sam Kurath, qui recommande aussi d’automatiser l’épargne, par exemple avec un virement bancaire automatique « même de seulement vingt francs », juste après avoir reçu sa paie. Il encourage également l’usage d’applications de gestion budgétaire ou d’outils d’intelligence artificielle capables d’analyser les habitudes de dépenses pour mieux les ajuster.
Mais l’épargne ne relève pas que d’une affaire de chiffres. « L’argent touche à l’estime de soi, à la liberté, à la sécurité… et parfois à la honte », rappelle Sam Kurath. Nos habitudes viennent aussi de notre histoire : « Une personne ayant grandi dans le manque peut avoir tendance à trop dépenser ou à accumuler ». Voilà pourquoi MoneyHaxx propose une approche globale, mêlant astuces concrètes et réflexion personnelle. « L’idée est de transformer la relation à l’argent, pas uniquement les comportements. »